Nicolas Robine – Avocat

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La pratique du “client mystère” permet-elle de sanctionner un salarié ?

Dans un arrêt du 6 septembre 2023, la Cour de cassation a établi que la pratique du client mystère est licite. Cette méthode permet à un individu de se rendre incognito dans une entreprise pour évaluer la qualité de son service. Elle peut être utilisée comme outil d’amélioration, mais aussi, nous dit la Cour, comme preuve en cas de procédure disciplinaire à la condition toutefois que l’employeur ait informé préalablement les salariés de cette pratique, comme l’exige la loi.

Comprendre la pratique du client mystère

Le client mystère est une personne qui visite une entreprise sous une fausse identité pour évaluer l’expérience client. Après sa visite, il rédige un rapport détaillé sur tous les aspects du service ou de l’accueil. Ces rapports sont souvent utilisés pour améliorer la qualité du service en identifiant des domaines nécessitant des corrections ou une formation des salariés. Mais, dans certains cas, ils peuvent révéler des manquements professionnels ou des comportements fautifs des employés, pouvant conduire à des procédures disciplinaires.

L’arrêt de la Cour de cassation et ses enseignements

Dans un cas précis, un employé d’un restaurant libre-service a été licencié pour ne pas avoir respecté les procédures d’encaissement. L’employeur a utilisé un rapport émis par un client mystère pour prouver les faits reprochés. Le salarié a contesté le licenciement, affirmant que la preuve obtenue par un client mystère était déloyale et donc invalide.

La Cour de cassation a tranché en faveur de l’employeur, soulignant que la pratique du client mystère est licite. Cependant, elle a précisé que l’employeur doit informer préalablement les salariés de l’utilisation de cette méthode, conformément à la loi.

En l’espèce, l’employeur a fourni un compte-rendu de réunion du comité d’entreprise et une note d’information aux salariés pour démontrer que le salarié avait été informé de la pratique.

Formalités préalables à la mise en place d’un dispositif de contrôle et d’évaluation

L’employeur doit donc respecter certaines formalités avant de recourir à la méthode du client mystère. En premier lieu, le comité social et économique (CSE) doit être informé et consulté sur les moyens et techniques de contrôle de l’activité des salariés avant leur mise en œuvre.

Ensuite, l’employeur ne peut utiliser de dispositifs de contrôle cachés ou clandestins, autrement dit, aucune information personnelle sur un salarié ne peut être collectée sans que ce dernier en soit informé. Les salariés doivent être explicitement informés des méthodes d’évaluation professionnelles utilisées à leur égard.

Enfin, le dispositif doit être justifié par la nature de la tâche à accomplir et proportionné au but recherché.

Evidemment, si le dispositif implique un traitement automatisé de données personnelles, des exigences supplémentaires sont applicables.

Précautions à prendre par l’employeur avant la visite du client mystère

L’arrêt de la Cour de cassation rappelle que la mise en place de dispositifs de contrôle et d’évaluation est encadrée par la loi en ce sens que l’employeur doit donc informer préalablement le CSE et les salariés sur l’utilisation de clients mystères.

L’information des salariés peut être collective, comme par le biais d’une note d’information et il n’est pas nécessaire de divulguer la date exacte de la visite du client mystère, mais les modalités d’information doivent être bien pensées.

Dans l’ensemble, la décision de la Cour de cassation permet aux secteurs comme l’hôtellerie et la restauration de continuer à utiliser le client mystère comme outil d’amélioration et de preuve, à condition de respecter les formalités nécessaires pour assurer la légalité de cette pratique et des preuves qui en résultent.

Maître Nicolas ROBINE, votre Avocat à Marseille, vous accompagne et vous conseille dans vos questions en droit du travail.